Fuir. S’évader. Souffler. Quand on y réfléchit bien, on cherche tous à fuir quelque chose. La tête enfouie dans vos dossiers, vos mains toujours occupées à pianoter sur votre ordinateur, la tête en compote parce que vous en êtes à votre huitième heure de cours de la journée ou que votre enfant court sans cesse dans l’appartement, les oreilles irritées par le téléphone qui n’en finit jamais de sonner, les mains cramponnées à votre volant à cause des bouchons, votre talon haut qui vient de se coincer dans la bouche d’égout ? Dites STOP. Stop au train-train quotidien, à vos petits tracas, à votre ex qui ne cesse de vous harceler, à votre belle-mère qui veut que vous veniez souper toutes les semaines, à vos professeurs qui vous demandent toujours trop de travail. Dites stop et venez vous évader !

Certains l’ont déjà bien compris, et sont venus s’installer dans le comté de Pitkin, dans le Colorado. C’est dans cette magnifique région qu’ils ont trouvé leur havre de paix : Aspen et Twin Lakes. Entre lacs et montagnes, c’est l’endroit idéal pour pour venir se réfugier. Qu’ils y aient établi résidence principale ou secondaire, qu’ils soient présents 365 jours sur l’année ou seulement les week-ends, propriétaires ou locataires, entre Red Mountain et Rinker Peak, ils ont installé leur nid douillet, leur refuge, leur cocon près du feu de la cheminée. Et si certains s’y rendent pour le dépaysement complet, d’autres profitent des chalets et des villages pour s’amuser, faire la fête et rencontrer une foule de personnes différentes. Des tas de personnes se croisent et s’entrecroisent à Pitkin, interférant inévitablement dans la vie des uns et des autres.

Extrait :

Lentement, hésitante, je poussai la lourde porte en bois et pénétrai dans cet immense chalet. Il devait faire au moins quinze fois la taille de mon petit appartement à Denver. Les yeux écarquillés, je restai bouche bée devant le coin salon, aménagé de manière très cosy. J’avais beau n’être ici que depuis quelques secondes, j’avais déjà l’impression d’être chez moi. Il y avait quelque chose qui dégageait de la pièce, quelque chose d’agréable, de relaxant. Revenant à mes esprits, je déposai mes bagages devant l’escalier menant à l’étage et flânai à travers les différentes pièces. Tout était authentique : le parquet en bois massif, les poutres, les pierres du mur parfois apparentes, cette odeur de feu de bois qui régnait au rez-de-chaussée, et cette immense cuisine ouverte sur la salle à manger. Tout avait l’air d’un lieu convivial et propice au bien-être. J’arrivai enfin à la terrasse, surplombant la falaise. Le vent frais me donna des frissons que je ne remarquai même pas, tout à ma contemplation ; ébahie devant le paysage qui se dessinait devant moi. Montagnes plus hautes les unes que les autres, enneigées vers les hauteurs, parsemées de sapins, de skieurs, de chalets et de randonneurs. Le tout semblant être resté à l’état sauvage. L’homme s’était immiscé dans les lieux sans pour autant empiéter sur la nature. « Salut ! Moi c’est Patrick. » Je ne m’étais pas rendu compte que quelqu’un venait d’arriver derrière moi. Je mis un certain temps à revenir sur terre et à me décider de me présenter à mon tour. « Moi c’est Harmony, enchantée. » je lui servis un sourire amical. « Et bien, Harmony, on revient justement de notre randonnée en raquettes. Tu viens nous rejoindre ? On va sûrement jouer aux cartes. » J’acquiesçai d’un signe de tête et le suivis dans la salle de séjour. Il me présenta alors à une dizaine de jeunes déjà installés dans les divans. Le chalet semblait tout d’un coup  animé par les voix et les rires de toutes ces personnes. C’est à ce moment-là que je compris que, même si cette location m’avait coûté un bras, je n’allais pas le regretter.